(Québec) S’il devient chef du Parti québécois (PQ), Paul St-Pierre Plamondon veut s’attaquer à un enjeu longtemps tabou dans le camp souverainiste : l’économie d’un Québec souverain.

Patrice Bergeron
La Presse canadienne

Le candidat à la direction du PQ entend mettre à jour les études économiques sur un éventuel Québec indépendant et confectionner un « budget de l’an un » d’un pays _ ironiquement le dernier à avoir estimé ce budget était… François Legault, du temps où il était au PQ en 2007.

Selon M. St-Pierre Plamondon, il est grand temps de mettre fin à la campagne de peur des fédéralistes, et de démontrer, chiffre à l’appui, que le Québec s’en tirerait mieux s’il était souverain. En outre, les décisions d’Ottawa en matière de crédits d’impôt et de commerce international défavorisent le Québec, parce que son poids diminue dans la fédération, a-t-il fait valoir.

Après plusieurs tournées et consultations dans tout le Québec au cours des dernières années, M. St-Pierre Plamondon a constaté que la viabilité économique d’un Québec souverain inquiétait les citoyens, ainsi que la péréquation.

S’il est élu chef le 19 juin prochain, il veut mettre sur pied un incubateur de recherche au quartier général du PQ, pour que cet espace collectif ouvert rassemble chercheurs et étudiants.

« Culture du mensonge »

« Il faut sortir de la culture du mensonge, […] s’éloigner de la propagande et revenir aux faits », a-t-il plaidé, dans une entrevue avec La Presse canadienne dimanche.

Il dénonce le discours « classique répété par les libéraux et la Coalition avenir Québec : “on n’a pas les moyens, on n’est pas assez bons, on n’est pas capables” ».

M. St-Pierre Plamondon veut prouver le contraire s’il est élu chef. Les dernières études remontent à 1995 et il faut les mettre à jour en tenant compte de la nouvelle économie mondialisée.

Le plus riche à naître

« On serait le pays le plus riche de l’histoire de l’Occident à réaliser son indépendance. Jamais un pays n’aura été aussi riche au moment de naissance, selon les données qu’on a, en richesse par habitant, si le Québec devient indépendant, en 2023-2025. »

Répliquant du même coup à ceux qui disent que le Québec est trop petit pour voler de ses propres ailes, il a fait valoir que les petits pays occidentaux sont en tête au palmarès de la prospérité ; Suisse, Danemark, Norvège.

Il répond aussi à ceux qui redoutent qu’un Québec souverain soit exclu des accords de libre-échange.

Dans l’économie mondialisée actuelle, pas du tout le contexte de 1995, « ce serait très surprenant qu’il cesse de faire partie des grands accords internationaux, a-t-il fait valoir. Maintenant les marchés sont ouverts, alors qu’à l’époque le Québec était très dépendant du marché canadien » et les économies étaient plus « hermétiques ».

Ce contexte mondialisé « diminue le risque et facilite certaines choses dans la création d’un État souverain », estime-t-il.

Péréquation

M. St-Pierre Plamondon entend même monter au front concernant la péréquation, souvent perçu comme le talon d’Achille de l’argumentaire indépendantiste : le Québec encaissera un chèque de plus de 13 milliards du fédéral en 2020.

Toutefois, selon le prétendant à la direction du PQ, la péréquation n’est pas un véritable investissement dans l’économie, et cette « dépendance » à la péréquation qui vient de l’industrie des sables bitumineux nuit au bout du compte à l’économie : elle contribue à « l’engourdissement » de l’entrepreneuriat québécois et retarde le virage vert, a-t-il justifié.

« Si le profit fait par les pétrolières était fait plutôt par des entreprises québécoises qui vendraient d’autres formes d’énergie, quel serait l’état de nos finances publiques et l’état concurrentiel de l’économie du Québec ? Moi je pense qu’il faut le quantifier. »

Sujets d’étude

Dans son document, M. St-Pierre Plamondon énumère une série de thèmes que son centre de recherches devrait approfondir, notamment :

*chiffrer les investissements directs dans l’économie du Québec venant du gouvernement fédéral par rapport aux investissements fédéraux dans les autres provinces ;

*chiffrer le déménagement des sièges sociaux et des centres décisionnels de Montréal vers Toronto de 1995 à aujourd’hui ;

*chiffrer les coûts de tous les cas où les intérêts économiques du Québec ont été sacrifiés par Ottawa dans le cadre de négociations de traités internationaux ;

*chiffrer quel serait l’impact économique pour le Québec d’avoir sa propre image de marque et ses propres missions d’affaires à l’étranger à titre de pays indépendant ;

Personnalité connue de la télévision, M. St-Pierre Plamondon est avocat de formation, mais souhaite faire ressortir davantage son expérience dans le milieu des affaires. Il est détenteur d’un MBA de l’Université d’Oxford et a été jusqu’à tout récemment directeur des finances et des opérations d’un cabinet d’avocats.

Outre M. St-Pierre Plamondon, le député de Jonquière, Sylvain Gaudreault, et l’historien Frédéric Bastien ont annoncé qu’ils briguaient la direction du PQ. L’humoriste Guy Nantel et l’avocat spécialisé en immigration Stéphane Handfield ont par ailleurs manifesté leur intérêt.