Daech vise à établir un califat islamique avec sa capitale à Jérusalem

Les attentats de Paris et les menaces réelles en Belgique ont fait couler beaucoup d’encre. Les projets d’attaques sur Rome visant le Vatican s’ajoutent à des craintes sur Londres.

L’occident recherche l’unité face à ces agressions. Du fait même, un silence plane sur les exactions commises en Afrique, au Pakistan et au Bangladesh. Différentes lectures de ces événements sont possibles : on peut se limiter au plan stratégique, mais on peut aussi apporter un éclairage religieux qui ne convaincra pas tout le monde.

Le mouvement Daech vise à établir un califat islamique avec sa capitale à Jérusalem. A cet égard, les combats entre Sunnites et Chiites ne sont que broutilles. Ces deux sectes musulmanes affichent leurs haines pour distinguer les Persans des Arabes sunnites.

Le véritable objectif est de construire un Etat Islamique avec Al Qods comme capitale, bâtie sur les ruines de l’Etat sioniste. C’est une évidence qui s’impose en raison du caractère tragique et irrationnel de leurs agissements sophistiqués et à la pointe de la high tech.

Le temps n’existe pas

FREDERICKMANNS

Il est urgent de mettre à jour notre capacité à comprendre ce qui est en train de se passer. Il existe bien un Etat islamique. Il n’est pas question de jouer sur les mots. Ces concepts trouvent peu sinon pas d’écho dans la mémoire vive des Européens parce que la plupart des pays concernés ont versé dans des lubies du mythe de la mort de Dieu, du sens et du non-sens intégral.

L’Etat islamique concrétise avant tout le désir encore flou de haines qui veulent se déchaîner. On peut dire qu’il s’agit d’une volonté post-coloniale de rebâtir un califat de Baghdad, disparu avec l’empire ottoman. Daech est ce « proto-état », donc une entité étatique dont la volonté de structure juridiquement cohérente.

Il serait alors fondé sur un territoire qui correspond, en gros, à celui qu’avait précisément conquis le Calife Omar Ibn al-Khattab en quelques années depuis la Cyrénaïque libyenne jusqu’à la Perse au nom de la Loi islamique et de la révélation reçue par le Prophète de Médine. Or, ce projet apparaît un siècle après la chute de la Sublime Porte comme en cohérence avec l’extension du prosélytisme musulman.

L’Islam est aujourd’hui en l’an 1437, ce qui correspond, pour cette religion issue du désert et des clans, à une période moyen-âgeuse pour les Occidentaux. Les Musulmans ont pourtant sauvé les écrits de l’Antiquité grecque et latine.

Il faut discerner les plans : la violence est naturellement humaine, tout comme l’est l’endormissement idéologique par le jeu des affinités sélectives. L’obscurantisme et la réapparition d’un paganisme cyclique s’y affirment dans de prétendues libertés éthiques, morales et dérivent lentement vers la confusion entre « permis » et « interdit ». La violence est autant un tabou puissant que l’est l’initiation rituelle, passive dans certaines religions.

Il est normal que l’Islam désire étendre la révélation du Prophète sur l’ensemble de la nation humaine comme le fit le christianisme pendant des siècles. Il semble se manifester actuellement par des sauvageries insensées, comme au temps où les Barbares conquéraient l’empire romain et certaines régions christianisées.

Puis ce furent les siècles d’expansion de la foi chrétienne, rendue possible par l’Edit de tolérance pris par Constantin (315), autorisant peu à peu la main-mise du christianisme, au-delà de la foi, sur toutes les leviers de la société étatique. « On doit remarquer que, depuis la disparition de tout état officiellement chrétien, il n’existe plus de persécutions ou de brimades de nature religieuse commises au nom du christianisme », notait Michel Malherbe (« Les Religions de l’Humanité, p. 506, Criterion).

Il est possible de ne voir dans les menaces graves qui pèsent sur les pays occidentaux une manifestation de dérives propres à des sociétés déséquilibrées par des disparités sociales, économiques, voire déficientes au niveau de la transmission de vraies valeurs historiques et spirituelles. L’imagination et la puissance onirique du mythe se réfugient dans des conflits dont le facteur religieux sert d’alibi à des querelles ethniques ou politiques. Le mythe de la restauration d’un califat néo-historique, pratiquement inédit dans ses structures, repose sur la négation totale de la réalité israélienne.

L’Etat islamique est présent en Israël, non comme un proletariat victimisé de jeunes Arabes sans perspectives d’avenir. Ils existent. D’autres ont su suivre les cursus scolaires et universitaires de haut niveau offerts par Israël, s’intégrer pour construire un avenir commun tandis que certains ont utilisé ces structures pour combattre l’Etat hébreu.

Les médias européens répètent que les djihadistes ont voulu tuer une jeunesse dont l’art de vivre était celui des valeurs de la liberté. Mais les djihadistes étaient aussi des jeunes dont l’art de vivre fut sans doute messianique, utopique, souvent « millénariste » et suicidaire. Cela souffre la comparaison et quelques similitudes qui ont mal tournées. L’Etat Islamique a acquis un territoire, des allégeances de la part de communautés diverses qui réclament la restauration du califat. Lorsqu’Abou Bakr al-Baghdadi s’est proclamé « calife », il a affirmé un lien – pourtant bien faible – avec la réalité multi-séculaire du califat traditionnel qui ne fait que se saisir du vide causé par l’effondrement structurel des états proche-orientaux.

Ils avaient été créés, de manière fictive, selon les stratégies et les desiderata des puissances françaises, anglaises et autres. A ce jour, la Syrie, mais aussi le Liban, l’Irak ne réapparaîtront plus dans la forme consentie à l’issue de la deuxième guerre mondiale. La Libye, le Soudan, le Yémen n’ont plus de réalité étatique et viennent grossir le flot de réfugiés ou fugitifs incertains.

La Jordanie risque de se trouver dans de grandes difficultés mais tient bon. Nous assistons à des guérillas urbaines. Les attentats perpétrés dans les grandes villes de France montrent des carences dans la préparation logistique et psychologique.

Les solidarités ont aussi leurs limites, en particulier à l’égard du judaïsme. Une attaque conjuguée de l’Europe, des Etats-Unis et de la Russie sur Daech et des petits états en constitution au Proche-orient peut-elle accéder à la victoire ?

Serait-ce même cohérent alors que les intérêts religieux de ces pays pour le Croissant Fertile doivent être revus au vu du remodelage confessionnel. L’apparition d’un Etat juif reconnu, légitime de facto et de jure face à des états voisins en germe après leurs dislocations civiles, statutaires et confessionnelles doit inciter à sortir de la cécité verbale et diplomatique. Il est alors réconfortant de penser que nous sommes partis pour une aventure humaine qui prendra forme dans un ou deux siècles.

Il appartient à notre génération d’être forte et fidèle à l’héritage vivant que nous avons reçu et avons la tâche de transmettre. Une lecture chrétienne des faits n’est pas totalement fausse. Habitués depuis Vatican II au dialogue inter religieux les chrétiens savent que la vérité est symphonique. Cependant les chrétiens ont été surpris lorsqu’ils ont vu ce que ces barbares ont fait aux chrétiens d’Orient. Mais aujourd’hui, tous doivent accepter le réel: nous sommes en guerre.

C’est même un devoir de faire sortir de l’aveuglement – volontaire ou non. L’Islam laïque à la Sarkosy est un leurre. »Chassez le naturel, il revient au galop », affirmait jadis un penseur français. Daech est en guerre contre la France. Pas seulement contre ce que la maladroite politique française a fait en Syrie.

Daech est en guerre contre ce les chrétiens croient. C’est essentiel de le comprendre. Daech affirme avoir visé Paris «qui porte la bannière de la croix en Europe». Tout cela, les chrétiens d’Orient le criaient depuis quelque temps. Ce n’est pas la société française qui a la responsabilité de ce qui s’est passé, c’est le gouvernement. La réponse à ces attentats ne pourra pas être que militaire, policière, ou judiciaire.

La victoire dans cette guerre ne se jouera pas seulement en Irak ou en Syrie, ou dans les repaires du fondamentalisme de l’Europe. Mais il y a une autre bataille à mener. Elle est culturelle et spirituelle. Si Daech combat ce que nous sommes, alors c’est en se réappropriant ce que nous sommes, que nous serons victorieux. Nos valeurs, notre identité, notre histoire, notre culture et notre foi sont les conditions de notre survie et de la victoire.

Face à l’islamisme, un gouvernement prisonnier de la culture libertaire et du relativisme rend la France fragile et démunie de ce qui fait sa grandeur et sa force. Un gouvernement qui ne transmet plus l’héritage culturel et spirituel des siècles passés, qui ne sait plus ce qu’est le vrai, le bien, le beau, qui n’assume pas son passé ni sa vocation, ne sera pas fort devant ces envahisseurs –qu’il a d’ailleurs appelés et invités pour prendre la place des chrétiens. La force d’un pays, c’est son âme, ce sont ses racines. C’est en s’appuyant sur son histoire de vieux pays chrétien mais à l’âme toujours jeune, que la société pourra affronter cet ennemi.

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